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Timide et malmené pendant la première période, Manchester City a su progressivement éteindre le PSG lors du match aller des demi-finales de Ligue des champions. Analyse de ce match à deux visages et des ajustements de Pep Guardiola.
Pour sa première avec Manchester City à ce stade de la plus prestigieuse compétition européenne, Pep Guardiola ne voulait pas se manquer. Après avoir enchaîné les désillusions lors des précédentes campagnes en C1, l’entraîneur catalan avait un plan pour contrecarrer les forces du PSG.
Lors des matchs aller contre le FC Barcelone et le Bayern Munich, les Parisiens avaient fait très mal sur transition en attaquant l’espace laissé dans le dos des défenseurs, grâce notamment à la vitesse supersonique de Mbappé et la vista de Paredes, Neymar, Verratti, Di Maria et Draxler. Pour se prémunir de ça, Pep Guardiola a clairement élaboré un plan en début de match qui ne s’est pas avéré efficace.
Une entame prudente et trop timide
« Vous savez quand on affronte le PSG, on veut bloquer ces joueurs exceptionnels que sont Neymar et Mbappé », a indiqué l’entraîneur de Manchester City à l’issue de la rencontre. Afin d’éviter de prendre des vagues dans son dos et limiter les dégâts que pouvait provoquer Mbappé dans la profondeur en cas de pressing haut raté ou trop facilement éliminé, Manchester City a entamé le match en défendant dans un bloc mi-haut assez passif, qui laissait les premiers relanceurs parisiens (Marquinhos, Kimpembe et Paredes, qui venait souvent s’insérer entre les deux défenseurs centraux) libres. Ces derniers avaient donc tout le loisir de manœuvrer.
Illustration du bloc mi-haut des Citizens
Paredes venait souvent s’insérer entre Kimpembe et Marquinhos pour bonifier les sorties de balle parisiennes
Une stratégie qui ne s’est pas vraiment révélée payante puisqu’une erreur technique de Rodri a donné, dès la première minute, une belle opportunité de contre à Mbappé, qui a servi Neymar pour le premier tir de la rencontre. Le problème de ce bloc mi-haut était aussi son manque de compacité qui donnait des couloirs de passe en plein cœur du jeu qu’ont su exploiter les Parisiens dans les premiers instants de la rencontre.
L’erreur de Rodri dès la première minute du match suite au pressing de Di Maria. Notez le positionnement haut de Cancelo à gauche, qui ajustera son positionnement dans les minutes suivantes
Un contre qui aboutira à la première occasion parisienne
Illustration du manque de compacité du bloc de Manchester City en début de match
Attiré par Gueye, Bernardo Silva laisse un couloir de passe libre vers Verratti qui va ensuite parfaitement orienté le jeu du côté opposé
Focalisé à contrôler Mbappé, Cancelo laisse son couloir libre, ce dont va profiter Florenzi
Dans les 40 premières minutes du match, Manchester City déclenchait son pressing uniquement sur les passes en retrait vers Navas. Et encore, le pressing de De Bruyne n’était pas suivi par ses coéquipiers, qui restaient prudents comme Mahrez et Walker sur cette image
Mais pour bien contrôler les transitions parisiennes et la vitesse de Mbappé, les Citizens avaient aussi fait le choix de la prudence en possession du ballon. Ainsi, dès les premiers instants de la rencontre, on a pu voir Manchester City peu entreprenant sur phase offensive avec peu de projections des latéraux et des milieux de terrain et peu de prises de risque qui ont été illustrées par l’activité restreinte de Foden, cantonné à son couloir gauche et qui a très peu dézoné en première période, et par le positionnement relativement bas de Cancelo, peut-être aussi refroidi par la perte de balle de Rodri lors de la première minute du match. Le choix d’aligner Kyle Walker en arrière droit était aussi clairement un signe de la volonté des Skyblues de contrôler la vitesse de Mbappé.
En première période, les Citizens ont effectué peu de centres et se sont contentés de miser sur les ouvertures et les centres en diagonale dans le dos des latéraux qu’ils affectionnent tant. Le problème, c’est que les hommes de Pep Guardiola ont manqué de justesse technique sur ces actions durant la première mi-temps
Qualité technique et malice sur corner
En raison de l’approche prudente de Manchester City avec et sans ballon en début de match, le PSG a réussi à jouer les yeux dans les yeux avec lui. En avant-match, on soulignait l’importance de la qualité technique de Verratti et Di Maria pour se sortir du pressing de Manchester City, mais il fallait aussi signaler celle de Neymar, qui a beaucoup décroché pour fluidifier les sorties de balle parisiennes. L’association de talents au milieu de terrain a permis aux Parisiens de se créer des opportunités de se projeter dans la surface de réparation adverse et de provoquer de nombreux corners.
Illustration des combinaisons parisiennes entre Neymar, qui a souvent décroché, et Verratti pour se sortir de la pression adverse
Des combinaisons qui ont permis aux Parisiens d’atteindre la surface de réparation de Manchester City
Le staff de Mauricio Pochettino avait justement mis en place une stratégie redoutable sur les coups de pied de coin avec des rôles cruciaux occupés par Verratti et Paredes. Pour empêcher les deux meilleurs joueurs de tête de Manchester City (Stones et Dias) de remporter des duels aériens, les deux milieux parisiens étaient chargés de se positionner devant eux pour bloquer leurs courses et permettre à leurs coéquipiers d’arriver lancés. C’est exactement ce qui s’est produit sur le but de Marquinhos, avec un écran parfait de Paredes qui a gêné Ruben Dias au moment de sa prise d’appel pour sauter vers le ballon.
Les écrans de Verratti sur Stones et de Paredes sur Dias (cercles rouges) qui vont permettre à Marquinhos (cercle jaune) d’avoir un avantage dans son duel aérien
On peut voir comment Stones et Dias sont perturbés dans leur course
Bloqué par Paredes, Ruben Dias est désavantagé dans son duel aérien avec Marquinhos
Quelques instants plus tard, les Parisiens reproduisaient la même combinaison sur corner mais Di Maria tentait sa chance directement avec un corner rentrant avant que Paredes, du côté opposé, manque de peu de doubler la mise en jaillissant toujours au premier poteau, qui était la zone privilégiée des tireurs. Finalement, « l’erreur » des Parisiens aura été de ne pas avoir pu doubler la mise pendant leurs temps forts. Car dès la 41e minute, Manchester City a changé d’approche.
Suite à une remise en jeu de Navas, on a pu voir les Citizens beaucoup plus haut et prêts à sortir agressivement sur les défenseurs Parisiens
Grâce à ce pressing haut coordonné, Walker intercepte le ballon
Ce qui donne une belle opportunité à Foden d’égaliser qui donnera aussi le ton de la deuxième période des Citizens
S’adapter sans se renier
« Les gars, jouez au foot ! Faites preuve de personnalité, et jouez ! Si on doit perdre, perdons, mais on doit essayer ! On doit être nous-même, agressif, surtout avec le ballon. » Voici en substance le discours de Pep Guardiola à la pause. Timides et timorés en première mi-temps, ses hommes ont lâché davantage les chevaux en deuxième tout en conservant leurs principes fondamentaux et le plan initial : contrôler les transitions offensives du PSG.
Dès l’entame de la seconde période, les Citizens ont harcelé les premiers relanceurs parisiens, qui n’ont plus su ressortir les ballons et qui ont progressivement subi les possessions « défensives » des hommes de Pep Guardiola. Car en réalité, Manchester City a aussi mieux défendu grâce à sa conservation du ballon et au positionnement plus haut des compensateurs défensifs (Rodri et Gündogan). Les rares opportunités de contres parisiens ont aussi été malicieusement coupées dès leur source. Ce que l’on appelle grossièrement des fautes « intelligentes ».
Dès le début de la seconde période, on peut voir le positionnement beaucoup plus haut des joueurs de Manchester City
Nouvelle illustration ici
Contrairement au début de match, le pressing du premier défenseur est suivi par tous les joueurs
Les rares opportunités de contres parisiens ont été coupées par des fautes tactiques
En tirant le maillot de Neymar, Rodri coupe la contre-attaque parisienne à la source
Nouvelle faute tactique en fin de match pour annihiler une bonne possibilité d’attaquer pour le PSG
Les Skyblues n’ont pas pris beaucoup plus de risques en attaque en deuxième période, à l’exception des mouvements plus libres et plus axiaux de Foden. Les Citizens qui avaient peu joué dans les zones axiales lors du premier acte, ont commencé à toucher le jeune international anglais et De Bruyne dans ces zones, permettant aussi à Cancelo puis Zinchenko d’évoluer plus haut sur le couloir gauche et de faire reculer le bloc parisien. Acculés devant leur but et trimbalés de gauche à droite, les Parisiens ont perdu leur patience et leurs nerfs comme sur la faute du Gueye précédent le coup franc de Mahrez.
Foden a évolué davantage dans le cœur du jeu en seconde période. Ce qui a permis à Cancelo puis Zinchenko, son remplaçant, d’évoluer plus haut
En l’espace de quelques secondes, Foden touche une deuxième fois le ballon près de la surface de réparation. Après une séquence défensive de près d’une minute, Idrissa Gueye craque et fauche Foden
Nouvelle illustration du positionnement plus axial de Foden qui permet à Zinchenko de se projeter dans la surface
La chance a souri aux audacieux
« C’était un match à deux visages. En première mi-temps, on n’a pas su être dangereux. Eux non plus, je ne pense pas qu’ils ont vraiment été dangereux. Mais ils ont été un peu mieux que nous. En deuxième mi-temps, on a été bons, parce qu’on les a obligés à rester dans leur camp. On a fait tourner jusqu’à trouver les décalages. On a de la chance sur les deux buts. Même moi, mon coup franc il passe entre deux joueurs. Mais c’est le football et à l’arrivée on prend », résumait justement Riyad Mahrez après la rencontre.
S’ils ont été bien meilleurs et impressionnants de contrôle en deuxième période, les Citizens n’ont paradoxalement pas été très dangereux devant le but de Navas durant cette rencontre. Les deux buts inscrits par les Skyblues ont été plutôt chanceux. Sur le premier, il faut tout de même reconnaître que les coéquipiers de De Bruyne ont su exécuter à la perfection leur fameux corner à deux dont on vous avait parlé en avant-match afin d’effectuer ces centres-tirs si difficiles à gérer pour les défenseurs et les gardiens.
Comme contre le Borussia Dortmund, Mahrez et Bernardo Silva ont joué un corner à deux avant de servir Foden, qui a un meilleur angle pour centrer
Le ballon circule finalement du côté opposé vers De Bruyne qui va pouvoir effectuer un centre/tir vicieux qui finira au fond des filets de Navas. À noter le positionnement de Dias et Stones, restés en avant-postes
Sur le deuxième but, la réussite de Mahrez a été maximale mais il faut rappeler que le coup franc a été obtenu suite à une longue séquence de possession où Foden a touché le ballon deux fois devant la surface de réparation en appui (voir les illustrations précédentes). Ce qui a frustré les Parisiens, qui ont aussi coulé physiquement au fil de la rencontre.
Le coup franc chanceux de Mahrez, avec le ballon qui passe dans un trou de souris
Si l’issue de la rencontre a basculé sur « deux coups de chance », elle aurait aussi pu être différente si Marco Verratti avait réussi à couper le centre de Kylian Mbappé, consécutif à une talonnade géniale de Neymar sous la pression (56e). Cette action fut la seule occasion parisienne de la deuxième période avec un ballon en profondeur de Di Maria vers Mbappé coupé par Ederson.
La déviation géniale de Neymar dans le dos du Gündogan et Foden
Grâce à cette déviation, Di Maria peut avancer sereinement et servir Mbappé dans la profondeur
L’attaquant français gagne l’un de ses rares duels du match mais Verratti sera trop court pour couper son centre
L’une des rares fois où les Parisiens ont déjoué le pressing haut de Manchester City en deuxième période grâce au talent de Di Maria
Après avoir éliminé Cancelo, Di Maria peut avancer et servir Mbappé dans la profondeur
Ederson lit bien la situation et dégage le ballon devant Mbappé
La leçon de la rencontre, c’est peut-être la capacité qu’a eue l’équipe de Pep Guardiola de s’adapter sans renier ses principes, chose que l’on pouvait reprocher au technicien catalan lors de ses dernières éliminations en Ligue des Champions. Il a aussi su dompter sa propre peur de se faire punir par la vitesse de Mbappé en demandant à ses hommes d’évoluer plus haut. Preuve de sa maturité et de celle de son groupe ? Finalement, Manchester City a été récompensé par ses intentions et ses convictions plus que par sa production offensive.
« Le retour sera différent, il faudra jouer comme lors de la 2e période. Mauricio va changer des choses, nous aussi. Je suis content parce que j’ai vu des joueurs calmes dans le vestiaire, il y avait des câlins mais rien de plus, pas d’euphorie. (…). Ce n’est que la première manche, il reste un gros travail à faire. Quand on voit Neymar prendre le ballon dans les 10 dernières minutes et éliminer nos joueurs alors qu’ils sont à dix… Ce club a l’habitude de gagner la L1 presque tous les ans. L’année dernière, ils ont atteint la finale de la Ligue des Champions, ils savent ce qu’il faut faire pour y arriver, il faudra être nous-mêmes au retour », a prévenu Pep Guardiola à l’issue de la rencontre. On a hâte de voir ce que Mauricio Pochettino préparera au retour en réponse à la force tranquille des Citizens.
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